Simbikangwa : un pocès historique en France pour génocide au Rwanda

Bruno Gouteux - 15/12/2013
Image:Simbikangwa : un pocès historique en France pour génocide au Rwanda

Procès du 4 février au 28 mars 2014
« Un procès n’est jamais gagné d’avance » - Soutenez le CPCR

Pascal Simbikangwa sera finalement jugé pour « complicité de génocide » et « complicité de crimes contre l’humanité ».

L’ancien capitaine de l’armée rwandaise, Pascal Simbikangwa, « connu pour ses activités de tortionnaire bien avant le génocide » et « qui a participé aux massacres alors que depuis quelques années il se déplaçait en fauteuil roulant », sera jugé devant la cour d’assises de Paris, du 4 février au 28 mars 2014.

« Malgré la satisfaction de voir enfin, près de vingt ans après le génocide des Tutsi, un des hauts responsables rwandais jugé par la justice française, nous ne cesserons de regretter qu’il ait fallu autant de temps pour que ce premier procès ait lieu » déclare Alain Gauthier, président le Collectif des Parties Civiles pour le Rwanda [CPCR], qui figure parmi les plaignants aux côté de la LICRA, la FIDH et de la LDH.

« On lui attribue des assassinats d’opposants sous le régime de Juvénal Habyarimana, dont il était membre des services de renseignements. Il aurait assisté en personne à des séances de torture. »Cécile Deffontaines

Pascal Simbikangwa ne sera cependant pas jugé pour ses activités de tortionnaire bien avant le génocide, le Parquet ayant décidé des non-lieux partiels à propos de faits que le CPCR aurait voulu voir être retenus, « en particulier en ce qui concerne les actes de torture, prescrits, et la présence de Simbikangwa sur la colline de Kesho où plus de 1500 Tutsi ont été exécutés, présence attestée par de nombreux témoins ! »

C’est cependant un « procès historique » en France, le premier a juger un présumé génocidaire présent sur le sol national, alors que de nombreux autres sont encore en liberté, bénéficiant de soutiens et d’appui divers ou des lenteurs de la justice française, particulièrement scandaleuses dans ce dossier du génocide des Tutsi.

Ainsi, le Collectif des Parties Civiles pour le Rwanda dénonce « le fait que jamais le Parquet ne s’est résolu de lui-même à poursuivre des présumés génocidaires alors qu’il aurait pu, qu’il aurait dû le faire » :

« Sans le travail titanesque des parties civiles, personne n’entendrait plus parler de la présence de présumés génocidaires rwandais sur le sol français et le procès de Simbikangwa n’aurait jamais eu lieu. »

Cependant l’association rappelle qu’« un procès n’est jamais gagné d’avance » et qu’il faut maintenant se battre pour que Pascal Simbikangwa soit reconnu coupable des faits qui lui sont reprochés car en déposant plainte contre lui, elle ne « s’est pas engagé à la légère » : « nous avons de vraies raisons de le poursuivre, beaucoup de témoins et d’historiens le mettent en cause. « Sans haine ni vengeance », nous souhaitons que soit reconnue sa responsabilité individuelle. »
De plus une dizaine d’enquêteurs de la section de recherche du Pôle crimes contre l’humanité du parquet de Paris a fourni de nombreux documents s’ajoutant au dossier des parties civiles qui constitue désormais plus de 7000 pages - une centaine de témoins ayant également été auditionnés au Rwanda - ce qui explique la longueur du procès, presque deux mois, du 4 février au 28 mars.

Il faudra convaincre un jury populaire dont la plupart des membres ne connaissent que peu de choses sur le génocide perpétré contre les Tutsi au Rwanda, quand ils n’auront pas, comme une grande partie des Français, été largement désinformés par les médias hexagonaux. Vieillissant, Pascal Simbikangwa, sur son fauteuil roulant, niera les faits - maître Domitille Philippart, qui l’a vu en visioconférence lors d’une audience, rapportant même qu’il prétend avoir « défendu des Tutsi... »

Rien n’est gagné, donc. Et un procès coûte cher pour les parties civiles, raison pour laquelle le Collectif des Parties Civiles pour le Rwanda lance à nouveau un appel « à tous ceux qui croient que la justice est un passage obligé pour rétablir les victimes dans leur dignité ».

Vous pouvez aider en faisant un don, en adressant un chèque au CPCR (61 Avenue Jean Jaurès 51100 Reims) ou en vous rendant sur leur site : http://www.collectifpartiescivilesrwanda.fr/faites-un-don-en-ligne.

Rendez-vous à Paris, à partir du 4 février 2014, pour soutenir les parties civiles et les rescapé(e)s du génocide dans leur combat pour la justice.


La procédure par Trial Watch

Pascal Simbikangwa est inculpé pour génocide, complicité et conspiration de génocide, et de crime organisé.
Il était le chef du Service Central des Renseignements du Rwanda. Après le génocide des Tutsi, il séjourne aux Comores et en 2005 il part pour Mayotte sous une fausse identité avant d’être arrêté en octobre 2008 pour séjour irrégulier en bande organisée et falsification de documents administratifs. Lors de sa détention, sa véritable identité est établie et la police française découvre qu’il est recherché par Interpol. Il sera transféré à Paris le 20 novembre 2009.

En 1993, la Commission internationale d’enquête sur les violations des droits de l’homme au Rwanda a découvert que Simbikangwa est impliqué dans des massacres, des assassinats et plusieurs perturbations des partis d’opposition organisées par l’entourage du Président. L’accusation a rencontré un témoin qui a attesté de l’implication directe de Simbikangwa dans le génocide et les activités d’escadron de la mort.
En mai 2010 deux juges d’instruction français se sont rendus pour deux semaines au Rwanda en vue d’enquêter sur la responsabilité alléguée de Simbikangwa dans le génocide de 1994.
Le 4 février 2013, un juge d’instruction du pôle « génocide et crime contre l’humanité » du Tribunal de grande instance de Paris a transmis l’avis de clôture de l’instruction aux parties. Le 1 mars 2013, le parquet de Paris a requis la mise en accusation de Simbikangwa pour « complicité de génocide » et « complicité de crimes contre l’humanité » commis à Kigali et sur le territoire du Rwanda, notamment dans la préfecture de Gisenyi (nord-ouest), entre avril et juillet 1994.
Le 29 mars 2013, les juges du pôle « génocide et crime contre l’humanité » du Tribunal de grande instance (TGI) de Paris ont décidé de mettre Simbikangwa en accusation pour « complicité de génocide » et « complicité de crimes contre l’humanité ».
— Trial Watch

Cour d’assises de Paris

Escalier K, 2ème étage, 10, bd du palais – 75001 Paris
Téléphone : 01 44 32 79 59 (de 9 H à 17 H)
www.ca-paris.justice.fr

Juridiction compétente pour juger les crimes, elle est composé de 3 juges professionnels et de 9 jurés. Le président de la Cour d’assises pour ce procès sera Olivier Leurent.
Depuis le 1er janvier 2001, les appels contre les verdicts de condamnation rendus par une cour d’assises sont réexaminés par une nouvelle cour d’assises composée de 3 juges professionnels et de 12 jurés (loi du 15 juin 2000).


Illustration : Pascal Simbikangwa, photo Interpol.

Bruno Gouteux est journaliste et éditeur —Izuba éditions, Izuba information, La Nuit rwandaise, L’Agence d’Information (AI), Guerre Moderne, Globales…—, consultant —Inter-Culturel Ltd— et dirige une société de création de sites Internet et de contenus —Suwedi Ltd.

Il est engagé dans plusieurs projets associatifs en France et au Rwanda : Appui Rwanda, Distrilibre, Initiatives et Solutions interculturelles (ISI), le groupe Permaculture Rwanda, Mediarezo

 15/12/2013

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vendredi  31 janvier 2014