Pauline Kayitare répond à la polémique

ishimwe - 10/04/2011
Image:Pauline Kayitare répond à la polémique

Lettre ouverte - et réponse de la rédaction
Génocide des Tutsi de 1994

[!glossaire][Màj : 28 avril 2011] Suite à la parution du livre « Dis leur que tu es Hutue », la rédaction d’Izuba.info publie ce texte proposé par Ishimwe autour de la polémique naissante autour de Pauline Kayitare et de son livre.

Son histoire, considérée à juste titre comme un message de paix, semble comporter quelques approximations et erreurs qui peuvent probablement résulter de la co-écriture du livre par un auteur qui n’a pas vécu ces événements tragiques, Patrick May, qui aura dû écrire à partir des entretiens qu’il a eu avec celle qui relate ces événements vécus - dans sa chair - à la limite de l’entendement.

Une approximation sur le parcours scolaire de cette victime de la barbarie ne peut suffire à discréditer tout son livre !

Nous ne pouvons laisser dire que Pauline Kayitare serait une usurpatrice, une menteuse, une affabulatrice, comme on peut le lire sur certains sites internet : elle a perdu une grande partie de sa famille dans le génocide programmé des Tutsi du Rwanda, en 1994, auquel elle aura pu miraculeusement échapper. Son témoignage, comme celui de tou(te)s les rescapé(e)s, nous permet aujourd’hui de saisir une partie de ce qui s’est passé, entre avril et juillet 1994, au Rwanda.

Ces témoignages parcellaires, parfois sujets à erreurs et à approximations, sont nécessaires : nous appelons toutes les victimes de cette barbarie exterminatrice à relater leur histoire, dans les livres et devant les tribunaux. Nous estimons, à Izuba.info, que la parole des rescapées est sacrée : celles et ceux qui osent - et nous savons combien ça leur coûte d’exposer publiquement ces traumatismes vécus - aborder ces heures [jours et mois !] tragiques de leur existence doivent être respecté(e)s, n’en déplaise aux aigris, aux envieux et aux praticiens - encore nombreux - du négationnisme.

« Divisionnisme », interprétations erronées du rôle joué par la France et son armée dans le génocide des Tusti... Certes, mais Pauline Kayitare n’est pas historienne. Elle nous livre juste (et c’est déjà immense), aidée de la plume de Patrick May, son témoignage, son vécu. Quant à son ressenti sur le Rwanda d’aujourd’hui, et l’aide - forcément pas assez conséquente - apportée aux rescapé(e)s, nous pouvons la comprendre : c’est la raison pour laquelle nous appelons de nos vœux au devoir de « réparation » - bien que ce qui s’est joué en 94 au Rwanda ne soit bien sûr pas « réparable » - de la France, largement impliquée dans cette tragédie moderne, et de la communauté internationale, qui, entre autre guidée à l’ONU par la diplomatie hexagonale, n’aura pas jugé nécessaire de stopper cette extermination programmée de milliers d’hommes, de femmes et d’enfants.

Nous avons bien sûr contacté Pauline Kayitare pour lui proposer de réagir à cet article, que nous publions pour ne pas être taxés de censeurs. Mais nous ne nous offusquerons pas du fait qu’elle ne le fasse pas.

La rédaction

La réponse de Pauline Kayitare, que nous remercions d’avoir répondu aussi intelligemment aux critiques formulées ici et là, en espérant faire définitivement taire cette odieuse « polémique ».

La rédaction

Je suis étonnée par la violence et la haine qui transpire à travers les critiques de mon témoignage. Le pompon revient à Bachimana Aimable qui, sur le site des Grands lacs, écrit : « Il faut faire taire cette menteuse et tous les soi-disant témoins de ce pseudo génocide ! ».
Tout est dit, et tout le monde aura compris le but de cette polémique, et voici ce que j’ai répondu aux Grands lacs :
Vous m’attaquez, me faites subir un interrogatoire policier, mais qui êtes-vous pour me donner des leçons ?
« Qui ne dit mot, consent » ? Et de quel droit exigez-vous de moi de m’aligner sur votre vision des choses ? Nous ne sommes ni sous le stalinisme ni sous le maccarthisme et je n’ai aucun compte à rendre à des censeurs.
D’ailleurs, au nom de quoi vous proclamez-vous détenteurs de la « Vérité » ? Et qu’est-ce que c’est que ces appels solennels à la censure ? Êtes-vous si peu sûrs de vous que vous ayez besoin d’être rejoints par la foule ?
Messieurs, avez-vous déjà été violés pour oser dire à une femme comment elle doit se comporter par la suite ?
J’ai écrit un témoignage où je raconte sincèrement et librement ce que j’ai éprouvé. Me contestez-vous le droit d’éprouver ce que vous ne ressentez pas ? Si vous avez connu des horreurs aussi traumatisantes que celles que j’ai traversées, et que vous avez agi de manière plus conforme à je ne sais quelle Vérité officielle, prenez donc la peine d’écrire vous aussi un livre dans lequel vous donnerez votre vision des choses. Même si celle-ci devait totalement s’opposer à la mienne, croyez-moi, je vous lirais avec intérêt : la démocratie ne respire que par la confrontation de perspectives différentes.
Sur ce, Messieurs les censeurs, adieu. Écrivez dans ce forum tout ce que bon vous semblera, amusez-vous à l’envi à me salir, je ne compte pas répondre à des insultes si évidemment téléguidées par des gens qui ont tout intérêt à discréditer sinon à détruire les rares témoignages relatant les horreurs du génocide des Tutsis…

Pauline Kayitare, le 27 avril 2011

Je reprends ici en détail, la polémique naissante autour de Pauline Kayitare et son livre « Dis leur que tu es hutue ».

Un rescapé du génocide à Kibuye, Antoine, lui a écrit une lettre ouverte, envoyée à son éditeur et restée sans réponse.

On dirait en droit « qui dit mots, consent ! » Mais que faut-il penser ?

Lettre ouverte à Pauline Kayitare

J’ai lu votre livre suite au salon du Livre à Bruxelles. Je suis moi-même rescapé du génocide et originaire de Karongi. Donc je connais très bien ta région qui est la mienne. Je préfère m’exprimer en Français pour permettre à mes amis européen de suivre.

De plus, j’ai vu un certains nombres de critiques naissantes sur la réalité de votre récit et personnellement je me pose des questions auxquelles je souhaiterais une réponse de votre part : Dans le livre vous dites avoir toujours été la première dans vos études secondaire, vous dites avoir terminé en 99 vos études secondaires.

Mais lorsque vous êtes revenu au Rwanda, vous avez terminé vos études primaires après le génocide donc en 95. (à la lecture de votre livre). Vous savez comme moi, que le cycle secondaire au Rwanda est de 6 ans, donc vous auriez du terminer vos Humanités en 2001 et non en 1999 ! [normalement vous étiez en 4ième secondaire]

Hors en 2001 vous étiez à l’Université de Kigali (ULK), certaines de mes amies vous connaisse. Et à ma connaissance en 2ième année Bachelor.

Dites mois QUELLE MIRACLE vous avez utilisé pour échapper à un Programme Obligatoire de 6 ans au Rwanda ? [valable pour tout le monde]

Donc si je comprends pour SAUTER les classes vous avez utilisé des méthodes de fraude !!! [Vous auriez joué sur certaines désorganisations administratives ?]

Est-ce que je me trompe ?

Vous affirmez dans votre récit « avoir terminée la 6ième année à la 5ième place » c’est au niveau National ? ou dans votre école ?. Si vous étiez la 5ième au Niveau National , vous auriez eu une bourse d’état !!! Pour l’étranger ou pour l’UNR (Université National du Rwanda à Butare).

Si vous étiez la 5ième de votre classe, cela n’aurait rien changé et vos études supérieures auraient été pris en charge à Butare.

Comme les lauréats les plus brillants de notre examen National ! Or vous avez fréquenté une université privée , et c’est Le FARG (Fonds d’Appui au Rescapés du Génocide) qui prenait en charge votre scolarité . Parce que vous ne faisiez pas partie des élèves attributaires des bourses nationales. Si je ne me trompe pas, il y a là encore tromperie. En partant en 2001 en France , vous étiez en 2ième Bachelor [niveau bac Français] à l’ULK , vous affirmez sur votre site étudiez à la Sorbonne et dans votre livre page 166 étudiée dans une école de comptabilité à Paris Bonne Nouvelles [donc un cours privé].

Dans votre interview sur Africa Numéro un , vous affirmez au journaliste avoir fait des grandes études. Pouvez vous nous précisez l’université, et titres que vous avez obtenu pour la gouverne des lecteurs ?

Sur votre synopsys long de http://www.kayitare.com [votre site], vous dites que votre père quittait la nuit l’ile de Nyamunini pour aller dans votre cellule !

Étant de Rutsiro, je me permet Madame, de vous signaler qu’il plus de 18 Kilomètres, soit 1 heure en bateau à moteur ou plus de 4 heures à la nage , connaissant l’état de santé général dans lequel se trouvait les Tutsi, pensez vous que sans manger, dormir, il est possible d’accomplir un tel exploit sportif ?

Je vous reprocherais de beaucoup d’imprécisions sur les lieux et places de votre histoire.

Vous dites avoir été témoin de l’extermination en témoin privilégiée de plus de 150 personnes, j’espère au nom des disparus que vous avez apporté votre témoignage au Gacaca de cette cellule !

Avez-vous donné ce témoignage ?

De plus vous affirmez avoir été violée ?

Avez-vous déposez une plainte contre votre violeur ?

J’attends vivement des éclaircissements de votre part, pour me permettre de comprendre bien votre récit et la véracité de celui-ci.

Merci

Antoine Habiyambere
habiyambereantoine rocketmail.com

Dans Grands Lacs Info

• Mahoro79, le samedi 04/16/2011 déclare :

A propos de la Zone Turquoise dans ton interview dans Africa N°1
tu affirmes "que l’armée française ne pouvait pas être partout pour sauver les
Tutsi".

Pauline, si la France avait voulu sauver les Tutsi, elle aurait fait car elle
disposait d’assez d’influences et de troupes chez nous, à Kibuye. Mais les
objectifs de cette mission était de protéger et de permettre d’évacuer les "amis
de France"
.
Pour mémoire, voir le témoignage de Patrick St Exupery qui est très clair.

Toujours dans Grands Lacs Info, Mahoro79, déclare :

A propos de la page 125 de ton livre :
En le lisant, j’ai été choqué par tes propos divisionnistes et ethniques. Je te
rappelle que depuis la libération du Rwanda, le 4 Juillet 1994, dans notre pays
nous sommes tous Rwandais.
Tu dis que les membres de la diaspora qui sont rentrés au pays après le génocide « paradent dans des voitures rutilantes et se font construire des villas et affichant une richesse insolente ».
Tu parles surtout sur ce que tu appelles les « abasajya » (les Tutsi d’Ouganda).
Pour moi, en tant que rescapée qui a eu de la chance, tout comme toi, je ne peux pas TOLÉRER ce discours.
Kigali se construit grâce aux efforts de tous les Rwandais.
(...) Tes allusions sur les grosses villas et les voitures, chacun est libre de
posséder ce qu’il veut par rapport à ses moyens.
Si on a l’occasion [NDLR : de s’exprimer], on doit raconter ce qui s’est passé au Rwanda sans tomber dans le piège du divisionnisme.
[kuko ntaho twaba dutaniye n’amagambo abadutsebye bakoreshaga]

Je lance un appel solennel à la communauté Rwandaise et aux amis du Rwanda :

EN CE 17ieme ANNIVERSAIRE du GÉNOCIDE DE 1994 DES TUTSI AU RWANDA NOUS NOUS DEVONS UN DEVOIR DE MAINTENIR ET DE DIRE LA VÉRITÉ.

NOUS NE POUVONS TOLÉRER PLUS LONGTEMPS DES « RÉCITS FICTION » pour émouvoir des personnes qui n’ont pas compris ce qui ’est passé pendant cette période.

Envoyons notre demande de stopper la diffusion de ce MENSONGE « Dis leur que tu es Hutue » au nom des disparus du Génocide pour laver leur honneur et diffuser la vérité.

L’histoire et les faits du GENOCIDE DES TUTSIS DE 1994 appartient à l’humanité et c’est un héritage pour les générations futures.

Adresse ou envoyer l’e-mail pour stopper ce tissus de mensonge à son éditeur
information andreversailleediteur.com et copie à Mahoro79 hotmail.fr.

MERCI D’AVANCE


Pauline Kayitare - Tu leur diras que tu es hutue

À 13 ans, une Tutsie au cœur du génocide rwandais

Préface de Colette Braeckman

Date de publication : 16 mars2011

ISBN 978-2-87495-128-2 - 192 pages - 16,90 €

Andre Versaille éditions.

Cet ouvrage a été écrit en collaboration avec Patrick May, coauteur du livre de Yolande Mukagasana, La Mort ne veut pas de moi.

Le site de Pauline Kayitare

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