Habyarimana tué par les siens

La rédaction - 16/12/2009
Image:Habyarimana tué par les siens

Kigali a mené l’enquête sur l’attentat qui a tué l’ex-président rwandais
Le Soir, lundi 14 décembre 2009

Qui a abattu l’avion du président rwandais Habyarimana, le 6 avril 1994, attentat qui servit de prélude au génocide ? Depuis seize ans, cette question ne hante pas seulement les Rwandais : elle a longtemps envenimé les relations entre Paris et Kigali, jusqu’au rétablissement récent de leurs relations diplomatiques.

Voici deux ans, en réponse à l’instruction menée à ce propos par le juge français anti-terroriste Jean-Louis Bruguière, qui avait débouché sur l’inculpation de neuf hauts dirigeants du Front patriotique (le parti du président Kagame), les autorités de Kigali décidèrent enfin de mener leur propre investigation.

Une commission composée de sept enquêteurs, dirigée par Jean Mutzinzi, ancien président de la Cour Suprême du Rwanda, explora minutieusement toutes les sources disponibles : les documents et témoignages produits à Arusha devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), les notes d’audience des tribunaux rwandais et des juridictions populaires « gaçaça » ainsi que les comptes rendus d’audition réalisés en Belgique par l’auditorat militaire après la mort des dix Casques bleus.

Mais surtout, les enquêteurs ont eu accès à 557 témoins rwandais, anciens acteurs politiques, ex-miliciens et militaires, et, en particulier des soldats et des officiers qui, le 6 avril, se trouvaient dans le camp de la garde présidentielle à Kanombe, à deux pas de l’aéroport.

Alors que le rapport Mutzinzi est terminé depuis plusieurs semaines, Kigali le garde toujours sous le boisseau. Cependant, le magazine africain Continental (www.continentalmag.com) vient de publier plusieurs extraits de ce document explosif. Il apparaît que l’enquête rwandaise rejoint les hypothèses formulées par Le Soir dès les premières semaines ayant suivi l’attentat : la responsabilité de la disparition du président Habyarimana incomberait aux extrémistes hutus de son entourage. Ces derniers, dont le colonel Bagosora, s’estimaient trahis par le chef d’Etat qui s’était résigné à céder aux pressions internationales et avait fini par accepter, conformément aux accords d’Arusha qui prévoyaient le partage du pouvoir, d’inclure le FPR non seulement dans le gouvernement de transition mais aussi dans l’armée. Pour de nombreux officiers, touchés par la limite d’âge, dont Bagosora, il s’agissait là non seulement d’une défaite politique (le partage du pouvoir avec les Tutsis abhorrés) mais aussi de la perte de nombreux privilèges.

Le rapport reprend longuement une thèse partagée par la plupart des Belges qui vivaient au Rwanda à l’époque : le président Habyarimana, très affaibli, avait été condamné par les siens.

Bien avant le 6 avril, des rumeurs concernant sa fin prochaine couraient dans la ville.

Plusieurs anciens militaires évoquent cette mort programmée, rappellent l’existence d’une association d’officiers extrémistes, Amasasu, qui combattaient énergiquement les accords d’Arusha et la fusion des deux armées.

Ces témoins décrivent aussi l’atmosphère particulière qui régnait dans le camp Kanombe la veille de l’attentat. Selon le document cité par le magazine, le tir de missiles serait d’ailleurs parti du camp Kanombe, un fief de la garde présidentielle, inaccessible aux soldats tutsis du FPR, ce qui explique pourquoi, abattu à très basse altitude, l’appareil s’est écrasé en feu dans les jardins même de la présidence.

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 16/12/2009

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