Côte d’Ivoire : vers la guerre civile ?

La rédaction - 17/03/2011
Image:Côte d'Ivoire : vers la guerre civile ?

Des ONG dénoncent les exactions en Côte d’Ivoire
Près de 400 personnes auraient été tuées depuis l’élection

« Ne vous imaginez pas que pouvez commettre des violations des droits humains en toute impunité car nous sommes en train de documenter les preuves de vos délits, et le moment du jugement approche à grands pas. » Choi Young-jin (Onuci)

Malgré la violente propagande orchestrée à son encontre par le camp Gbagbo et les agressions répétées dont elle est la cible, l’Onuci s’efforce de se rendre sur le terrain aussi souvent que possible pour collecter des indices et interroger des témoins, nous affirme Le Figaro.

Alors que des tirs à l’arme lourde sont signalés à Abidjan, sur fond de propagande et de manipulations médiatiques, la crise ivoirienne née au lendemain des élections présidentielles s’est transformée en conflit armé.

Se dirige-t-on vers une guerre civile ?

Aujourd’hui, les combats s’intensifient entre les différentes communautés. Abobo, quartier nord d’Abidjan comptant plus d’un million d’habitants et regroupant de nombreux partisans d’Alassane Dramane Ouattara, est en proie à la violence. Dans l’ouest du pays, plusieurs villes subissent des attaques. Les morts se comptent par dizaines (Africamix).

Les forces de sécurité et les milices loyales à Laurent Gbagbo ont commis des exactions qui s’apparentent à des crimes contre l’humanité, estime Human Rights Watch [HRW] dans un rapport publié mardi dernier, le 15 mars (Le Monde). Ces actes comprennent des viols, des exécutions et des cas d’immigrés d’Afrique de l’Ouest brûlés vifs, précise l’organisation de défense des droits humains basée à New-York.

HRW accuse également les forces pro-Alassane Ouattara, qui ont pris le contrôle du nord de la capitale ces trois dernières semaines d’avoir commis des exactions s’apparentant à des crimes de guerre, citant notamment l’exécution sommaire de onze soldats proches de M. Gbagbo.

« Je suis à Port-Bouët. Depuis hier soir, les pro-Gbagbo brûlent nos maisons. Il faut venir sécuriser l’endroit »

« Depuis trois mois, nous conduisons des investigations sur chaque cas d’exaction qui nous est rapporté », explique Omer Kalameu, chef d’équipe au sein de la division des droits de l’homme de l’Onuci. L’agence de l’ONU est chargée de collecter un maximum de renseignements sur les violences, déplacements de population et autres crimes commis dans le cadre de la crise postélectorale.

Ceux qui s’appuient sur les rapports de Human Rights Watch sont des « salauds ».
(Le Gri Gri International)

Le Gri Gri International, comme l’ensemble des médias soutenant Gbagbo, dénonce « le lobbying et la propagande » de l’ONUCI, des médias et des associations humanitaires, qui, depuis 2002, « déversent sur la Côte d’Ivoire et son régime tout ce qui est à même d’émouvoir, de mobiliser et de rendre détestable Laurent Gbagbo. »

Dans ce contexte de radicalisation du conflit né de la crise post-électorale, la propagande atteint en effet son paroxysme.

Politis rappelle que la crise post-électorale menace bel et bien de dégénérer en guerre civile.

Les forces armées fidèles à Laurent Gbagbo pourraient atteindre 55 000 hommes (de source onusienne). Alors que les pro-Ouattara compteraient dans leurs rangs près de 10 000 combattants. Un rapport de l’ONU conclut « à une détérioration drastique de la situation » et « particulièrement à Abidjan et dans l’ouest ». Pour jeter de l’huile sur le feu, Charles Blé Goudé, le leader des plus ardents partisans de Gbagbo, les « jeunes patriotes », a lancé lundi à la télévision « un appel historique pour libérer la Côte d’Ivoire ». (Politis)

Ibrahim Coulibaly, l’un des instigateurs de la tentative de coup d’État lancée le 19 septembre 2002 contre Laurent Gbagbo, chercherait actuellement à profiter de la crise pour se réimplanter dans le paysage local. Des hommes à ses ordres, les « commandos invisibles », semblent avoir assis leur autorité sur des quartiers entiers d’Abobo :

« Ces derniers jours, ils ont été engagés dans de violents combats contre l’armée régulière dans la zone de Plateau Dokui, située à mi-chemin entre le cœur d’Abobo et le quartier résidentiel de Cocody. Toutefois, l’influence et le périmètre précis de cette structure demeurent difficiles à évaluer » rapporte le Figaro.

Les « commandos invisibles » semblent avoir reçu un soutien matériel non négligeable, tendant à accréditer les annonces des médias contrôlés par le camp Gbagbo, qui accuse l’Onuci et la France de leur livrer du matériel militaire :

Toujours selon Le Figaro, « radios, détecteurs de métaux et autres pick-up sans plaque minéralogique sont ainsi apparus du jour au lendemain sur les pistes d’Abobo (...) ce qui contribue sans nul doute à expliquer que les « commandos invisibles » aient, en quelques semaines, réussi à repousser leurs adversaires à la lisière du quartier. ».

Mais la plupart de ces combattants seraient cependant « vêtus de guenilles ou de fragments d’uniforme dérobés aux policiers et aux militaires ennemis tombés sous leurs balles, armés de kalachnikovs, de fusils de chasse, de couteaux ou d’antiques pistolets qui semblent tout droit sortis d’un film de pirates ».

Le bureau du Procureur de la CPI exhorte les partisans des deux candidats et les forces de défense et de sécurité, à s’abstenir de toute violence.

Fatou Bensouda (procureur de la Cour pénale internationale) rappelle que les crimes ne resteront pas impunis. Alors que de nombreux actes de violence continuent d’alourdir le bilan macabre de la lutte pour le pouvoir engagée depuis le second tour des élections présidentielles : "J’encourage les deux leaders à faire appelle à leurs militants, à faire preuve de retenue et d’éviter tout actes de violence. J’invite les autorités ivoiriennes à enquêter sur les incidents similaires qui se sont déjà produits.

Tous les actes de violence seront surveillés et minutieusement examinés par le bureau du Procureur en vue de déterminer si des crimes relevant de la Cour pénale internationale ont été commis et devraient justifier qu’ils soient portés à sa connaissance."

Ce vendredi, Choi Young-jin, représentant de l’ONU en Côte d’Ivoire aurait annoncé qu’il n’a « jamais douté que la volonté du peuple ivoirien prévaudrait à la fin. Et la fin arrivera plus tôt qu’on ne le prévoit. » Celui qui annonce aux forces armées restées fidèles à Laurent Gbagbo que « le jugement approche à grands pas » aurait-il partie liée avec les « commandos invisibles » d’Abobo ?

Selon Olivier Herviaux (Africamix), « il s’agit pour Laurent Gbagbo et ses partisans, dont son épouse Simone, “dame de sang” versée dans un obscurantisme évangélique des plus sévères, et les sinistres “jeunes patriotes”, de faire front face à l’étranger, qu’il soit Dioula, Mossi, Français ou appartenant à l’Onuci. »

Il rappelle cependant que pour Gaëtan Mootoo et Salvatore Saguès, d’Amnesty International, Laurent Gbagbo et Alassane Dramane Ouattara “ne sont pas près pour le chaos”.

« Laurent Gbagbo veut “montrer à la communauté internationale à quel point il peut être nuisible”. Un marché machiavélique pour le partage du pouvoir qu’il a engagé au mépris des populations ivoiriennes. »

Mais quel que soit l’analyse que l’on peut faire de la situation ivoirienne ou les tentatives de décryptage des motivations et stratégies de Laurent Gbagbo ou Alassane Dramane Ouattara, aujourd’hui, dans les deux camps, des Ivoiriens meurent.

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 17/03/2011

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